jeudi 5 novembre 2015

Les rameurs.



D'un qui part à un qui reste, ils sont ensemble encore, les rameurs et puis tout vole et en éclats, les rires et les jeux, sur la route tout au loin, au loin, à la confiance, au mal caché, la tournure est imprécise, un reflet au coin de l’œil, il y a, ils sont en place, et dans la rupture au jour dit, la façon

est précise, la manière et le tremblement, à l’aise et à dire, tient, à faire et voilà, ils sont, ils sont et tout se réclame, de la vie, des yeux, des mains, des bras, tout est un peu tordu, tout courbe et tout incline au tremblement, à la déraison, l’unisson est fragile et l’accord hésite, ils sont ensemble

et tout frotte quand même, la raison, le tout, une évidence, les mots, sans affaires et sans bagages, les sacs se portent lourds, le tout encore organisé, le temps, le marais, les oiseaux au bord des routes, une fragile et inquiète fusion, un bras court, une jambe, tout tourne et tout glisse au temps

compté, aux vides à combler, on égratigne, on arrache, la peau vole et les oreilles longuement tintent, un avenir encore, des envolées lointaines, tout change et ils demeurent les enfants qui tournent, tournent, sur le chemin d’un caillou à l’autre, ils pensent rester au même lieu, à une branche,

ils se posent et d’une pierre à l’autre, la place est ouverte, la chambre est ouverte, le reste est pour toujours, et toujours dire, et toujours taire le jamais qui demeure, la vie de portes en portes, les mains au fond du cœur, la route sous les branches, les cannes et les bourdons ce tout, enclenchent,

les rêves passent, les endroits se remplissent et ordonnent, en avant, en dedans, les yeux ouverts, la vie est calme, il faut du souffle et de la force du temps, tout compte, du rire, tout efface, des pieds et des cailloux, de la présence, le bord est habité, les oiseaux glissent, au fond de l’eau, le miroir

bouge, une confession, une inspiration, le souffle doit courir, la main doit attraper, les coffres sont remplis et le destin promet de l’aube, du vent, du souffle à retenir, des heures à lisser, des tempes et une vie à franchir, ils sont encore et ensemble et parfois, loin, la vie, le vent, le souffle, les saisons

avancent, tout est rumeur et bientôt tout sera au tremblement, à la vie en évidence, à la confiance et tout, au plus grand, au plus haut, au loin, bien près, les rameurs se préparent et le voyage commencera, un émotion encore et tout respire, ils sont encore ensemble, à leur voyage, la terre, l’onde,

le feu, ils soufflent et approchent du chemin les animaux lentement, petit troupeau parfois en voyage, en courant au loin, en tenant de près, il faut, il faut, avancer et tenir les rêves, les idées, la vie en bienfait, en avance, il y a, ils sont au jour premier, à l’instant qui révèle, en haut, en haut vers tout,

qui vient. 
       
23 Août 2014.

1 commentaire:

  1. Penché contre un grand fleuve, infiniment mes rames
    M’arrachent à regret aux riants environs;
    Âme aux pesantes mains, pleines des avirons,
    Il faut que le ciel cède au glas des lentes lames.

    Le coeur dur, l’oeil distrait des beautés que je bats,
    Laissant autour de moi mûrir des cercles d’onde,
    Je veux à larges coups rompre l’illustre monde
    De feuilles et de feu que je chante tout bas.

    Arbres sur qui je passe, ample et naïve moire,
    Eau de ramages peinte, et paix de l’accompli,
    Déchire-les, ma barque, impose-leur un pli
    Qui coure du grand calme abolir la mémoire.

    Jamais, charmes du jour, jamais vos grâces n’ont
    Tant souffert d’un rebelle essayant sa défense:
    Mais, comme les soleils m’ont tiré de l’enfance,
    Je remonte à la source où cesse même un nom.

    En vain, toute la nymphe énorme et continue
    Empêche de bras purs mes membres harassés;
    Je romprai lentement mille liens glacés
    Et les barbes d’argent de sa puissance nue.

    Ce bruit secret des eaux, ce fleuve étrangement
    Place mes jours dorés sous un bandeau de soie;
    Rien plus aveuglément n’use l’antique joie
    Qu’un bruit de fuite égale et de nul changement.

    Sous les ponts annelés, l’eau profonde me porte,
    Voûtes pleines de vent, de murmure et de nuit,
    Ils courent sur un front qu’ils écrasent d’ennui,
    Mais dont l’os orgueilleux est plus dur que leur porte.

    Leur nuit passe longtemps. L’âme baisse sous eux
    Ses sensibles soleils et ses promptes paupières,
    Quand, par le mouvement qui me revêt de pierres,
    Je m’enfonce au mépris de tant d’azur oiseux.

    Paul Valéry (Charmes)

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