Pour
voir, pour commencer, pour recommencer, pour entreprendre et finir et réussir
et suivre sur le chemin une ombre bleue, un chien, une créature étrange. Il
court sans le savoir, sans y penser, sans rien entendre, sans avancer et sans
cacher aux autres la vérité et l’absurde et sombre réalité, ils courent sur le
chemin, les oiseaux blancs volent ensemble.
La
pluie a enfoncé la boue entre les pattes, les ongles rentrent et sortent, la
terre grise et noire remonte, des escargots, des coquilles, et signe le
pèlerinage, la confusion, le soin. Ils courent vers le haut, ils sautent vers
le bon dieu et croisent dans les airs le fil de la vierge, la punition, la
vendange, l’estocade, la saison prise au genou, serrée dans les cuisses, sous
la fenêtre, appuyés contre le mur.
Il
pleut et l’épaule enfoncée dans la paroi, ils courent l’un après l’autre, le chien
griffe et mord le bâton, la boue entre les ongles, entre les dents, les oiseaux
blancs volent ensemble, la lune meurt au matin, les oiseaux volent et se posent
ensemble. Le chemin seul, la longue crainte, la jambe folle sous le poids, les
charme de la ritournelle, la course dans le froid du jour et le jouir au partir
tôt. La grande fermeture, la clé serre les jambes et plie le doigt et ronge
l’âme et finit le seul œil qui ferme et penche sur le sol boueux, le pied y
plonge et recommence. Les ongles griffent le sol et la boue serre la cheville,
les jambes sont en émoi.
Le
chien court aveuglément sur la route, il faut finir cette avancée, ce vague
dans l’âme, cet échange, les oiseaux blancs passent si près et se frottent sur
la lisière, le canal frotte l’eau au ciel, les hommes courent sur la berge les
bateaux passent, la lumière avec l’air bleu est un plaisir et une
blessure, un gratte pied sur l’herbe rase. Il file dans le matin et songe bleu
et songe mal et rêve un malheur pour la tête, une errance pour la saison.
Un
feuillage berce le songe et frémit, il n’y a pas de vallon, la terre est plate,
plate, les ombres chevauchent, les herbes sèchent, les fleurs fanent, la sombre
espérance se tord et tire l’angoisse par le pied et le petit doigt et courbe la
tête et repense au poids des ans, aux vertus fades, aux chiens qui aboient sur
la terre, la boue entre les ongles, la bave sur le nez.
Les
yeux perdus dans la routine il tourne avant de tourner, il part sur la suite
des ombres et gémit sans volonté et frémit sur l’eau, il tire le char de la
nuit passée, les ombres bleues sont sur sa route, il y pense encore plus fort, il
tord le nez et se venge et pèse son poids sur les os, il tire de la nuit perdue
un reste de précision, une escapade, il court et force le chien à finir, à
venir et prendre un bain de boue entre les pieds et salit le pavé et frotte,
les traces de boue sur le visage, le poil séché et poudré, les éclats de nature
noire, le vert sous le pied, l’herbe
écrasée, les narines bouchées de sang et fermées aux ciel tout bleu d’or et
d’argent et plisse et déplisse la toile.
L’air
est bleu, les animaux se calment, il tourne sur lui et saute et arrache un
bâton droit, une évidence, les deux amusent le paysage, la droiture du chemin
clair, la boue entre les doigts du pied, il est fou et marche dans l’eau et
dans la boue et dans le vent et respire les odeurs fortes, l’herbe est verte et
sous le poids répand aux autres les odeurs et glisse sous son pied tendu, il
est fou et rempli ses yeux.
Ils
avancent dans l’herbe verte, le chien en soulevant les yeux, ils se remplissent
d’air sauvage et frémissent, le grand âge passe sur le chemin, il fait droit et
bon et il frissonne, le ciel d’air bleu ploie sous la charge, il passe comme un
roi chargé du poids de sa couronne.
27
Février 2007.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire