dimanche 30 décembre 2018

Sous le repère, inscrites quelques phrases.



Au fond, il faut avoir de grandes et belles choses à honorer, il faut au fond de la beauté, de la vigueur, du souffle, du renouveau, il faut honorer, honorer, sortir en y pensant : les fleurs sur la pierre, les gouffres obscurs, les antres fatidiques. Le destin s’y repose, la mort s’y reconnaît, il faut poser toute chose et y penser, y penser souvent encore et encore, penser à la ferveur aux allures d’histoire, au permanent à reconnaître, à la fonction à honorer, au dire si fragile, ce mot, ces mots gravés sur la pierre, sur les arbres.

Et je respire encore, ou donnez moi, ou donnez moi, il faut bien y penser, il faut le reconnaître, ces lueurs, ces tortures, ce passage, toujours vers le haut, vers le haut et je respire encore, ou donnez moi, il faut entendre ce qui est perdu là, ce qui se dérobe, le caché, le tu, le secret, il faut tout ignorer et redire, redire, les noms des chers, si chers, il sont apparus, apparus, disparus, ils se cherchent sur les arbres, sur les troncs, dans les branches, sur l’écorce, sur la pierre, la pierre, il y avait ici, et quelqu'un et quelque chose, où est il, où est il et je cherche et ne trouve plus rien, ni rien, ni peu, si peu, il y avait là quelque chose ou quelqu'un et je cherche, donnez lui, donnez lui ou donnez moi, donnez moi.

Il se retourne, et d’un mouvement, d’un mouvement il se retourne et il cherche encore, il cherche encore, il est perdu, il tend, il tend, et d’un mouvement tout meurt et recommence, tout meurt et recommence, sur les troncs, sur le bois, sur la pierre où sont-ils, où sont-ils, ils se cherchent et recommencent et on ignore et le nom et la trace, et il avance, et il avance dans le clair, sur le temps, entre orage et printemps, sur l’écorce, dans les branches, ils se cherchent et le temps les trouve, les trouve, il n’y a plus qu’un nom, une trace, un soupçon, il se cherche, il s’appelle, il se retient et il recommence.

Sur la pierre, sur les troncs, entre les feuilles : le réveil, le réveil, les oiseaux ils se donnent, ils se multiplient, ils enchantent, il se retourne et d’un mouvement, d’un mouvement si précis, si sincère, il se tourne et se donne, et tient, retient, il se donne et il tinte sur le rocher, sur le tronc, sur le lointain, dans le silence si précis, si calme et lointain, les branches agitées, les troncs dépouillés, la forêt manque.

Je t’appelle et je te cherche, et silencieusement il se tourne, il se tourne et il tient dans la main, sur le cœur, le nom, le nom, il recommence et il entend ou donnez moi, ou donnez moi, je me tourne et j’invoque et je n’ai plus, je n’ai plus, j’y reviens, je retiens et le nom et la trace, si glorieusement le nom gravé sur le tronc, si glorieusement, du laurier, du laurier.

Oh que voilà, que voilà, y va, y vient, y tourne et recommence, j’avance à flanc ouvert, perdu dans l’ombre et le repos, je me tourne et me noie dans les frondaisons, les frondaisons sur le calme, dans le jour tiède, sur le calme, vers le repos, un nom, une trace et j’entends et je vois et je suis.

Je respire et j’avance, trace après trace, danger sur danger, il se retourne, oh que le mouvement était précis et la feuille a volé de la branche à sa tête, il est perdu, noyé, tendu, tendu, le retour, le retour, il avance à la trace, au nom précisément, au nom à la trace, au retour, le mouvement précis et vif, si vif.

4 Mars 2009.

2 commentaires:


  1. A une passante

    La rue assourdissante autour de moi hurlait.
    Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,
    Une femme passa, d'une main fastueuse
    Soulevant, balançant le feston et l'ourlet ;

    Agile et noble, avec sa jambe de statue.
    Moi, je buvais, crispé comme un extravagant,
    Dans son oeil, ciel livide où germe l'ouragan,
    La douceur qui fascine et le plaisir qui tue.

    Un éclair... puis la nuit ! - Fugitive beauté
    Dont le regard m'a fait soudainement renaître,
    Ne te verrai-je plus que dans l'éternité ?

    Ailleurs, bien loin d'ici ! trop tard ! jamais peut-être !
    Car j'ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais,
    Ô toi que j'eusse aimée, à toi qui le savais !

    Charles Baudelaire

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