mercredi 9 août 2017

Enfonce le pied.



Il donne, et il viendra, et il commencera, et le soir sera là, et la pluie s’en ira, et puis dans l’air si doux, si long, si pur, et puis, quand il aura rempli ses mains et ses poches, et puis, et puis, il grandira et sera là, si loin, en haut, en bas.

Il avance sans tête, ni raison, et griffe les feuilles des arbres de petits bruits, de petits cris et d’évidences. Les pattes serrent fort et rompent le charme, la malle en osier roule sur place et recommence. Il se prélasse et embrasse d’un œil, les sentes, les cailloux, et le vent en frisson s’y glisse un peu plus, un peu plus, et toujours plus loin, et plus, et plus, et encore sur l’arête.

Le sourire des fous, le temps clair, la bataille, ils enveloppent loin, et tout, et courbent les branches pour cueillir du bout des lèvres les fruits à mûrir. Il y pense déjà, les fleurs à peine ouvertes, il pense au temps des fruits, à la récolte, à la conserve, au temps figé qui a passé, au temps du meurtre, vendanges amères et fruits dans les paniers, osiers qui penchent et sur le chemin mou, il pense aux cailloux qui s’enfoncent sous le pied.

Le poids est terrible et sèche la route, d’un coup dans la flaque, le vent sèche les fleurs à s’ouvrir avant la fortune, à se rendre dans la saison en rêve pour viser et constater, et entendre encore dire, et toujours, pour toujours, il avance sur le chemin et son pied glisse dans les flaques, le bas de la jambe est taché de boue et d’erreurs.

Et la pluie s’en ira, et le vent sèche les flaques et il espère les fruits bien avant les fleurs sur les arbres et les roses crispent le froid, sous la branche qui bat, qui bat, le volet claque et la maison se tord sous les rafales, il fait, et chaud et froid, et la légèreté impose un ordre sourd, une rumeur, une faveur, pour tamiser le ciel bleu, la poudre d’or dans les jardins. Il recommence et chante fort, et il donne, et il vient, et la pluie ira bien plus loin tordre le cœur des enfants à l’école.

Au soleil, au vent, à la rumeur de l’air qui chante dans les branches, il est parti sur le chemin et glisse dans la boue des flaques, et glisse sur son pied tordu, et il court moins, et il se perd, et il n’avance pas bien vite, et il est perdu dans le petit vent, et tiède et froid, et il arrache le ciel bleu d’un regard triste, d’un clin d’œil sous la voix qui gratte.

Il avance, il reviendra, il fermera la ritournelle, il grandira le pied qui glisse dans la flaque, et il se détend, et il recommence, et il avance dans l’air bleu, dans la fin du jour, et il attend, et recommence. Le soir viendra sur ses genoux, et il finira une histoire, et il parlera, de tout, de rien et la voix dans la haie attirera les oiseaux blancs et noirs et les étourderies dans l’heure.

Il franchira, et partira, la porte est fermée, qu’elle ouvre et il se penchera sur le soir et comptera les mots dans sa main tiède. L’air est bleu, les oiseaux noirs et blancs passent, la confiance est revenue, le pied portant glisse dans la flaque un poids d’âme douloureuse.

Enfonce le pied dans la boue, les oiseaux glissent au ciel bleu, les plus petits dans les haies chantent, les plus fort loin passent et griffent l’horizon, la peur est partie en voyage, le poids du corps glisse le pied dans la boue, dans la flaque, la pluie s’en ira et les cailloux pèsent dans la poche.

Il avance la tête est vidée, et souffrant, il arrache une pierre de plus au chemin, les bâtons roulent sur la sente, le soir est sec, le vent est tiède et frais et le malheur part en campagne, il finira sur le chemin. Il sèchera un petit mal, une vraie tristesse.

Une petite couronne pèse sur la tête qui passe, un poids de poudre d’or plonge le pied au cœur de la flaque, il fait froid et doux et sa tête se découronne.              
                                                                                                                           27 Février 2007.                                                        

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