mercredi 6 février 2019

Une histoire et un pont.

Il va se fatiguer, il sera épuisé au sortir de l’été, au sortir du temps, le chaud si chaud embarrasse et contracte, il est presque devenu sauvage, il se retourne, il est pétri d’effroi, il avance tout seul et sort sur le chemin, épuisé et peu sûr. Il se tourne et il voit, le pont est suspendu, les hommes vont et viennent, il chante dans son cœur une effusion certaine.

Une joie pour l’effort, pour le commandement, pour le contact mis et perçu, et il voit s’élancer la si grosse machine, il est épuisé et certain, les hommes se dirigent, les actes suspendus, les bonheurs assoiffés, il retient dans ses mains l’ombre des choses anciennes, le destin du pont sur le pont, sur un pont et plusieurs générations ont traversé ici.

Sans rien en faire, le pont passe sur l’eau, si tranquille et presque inutile, inutile de dire, inutile de faire et pourtant ils ont œuvré et la machine s’est emballée, ils ont vu sur les eaux les petites barques arrêter les grands vaisseaux, le conquérant est roux, il est assuré sur sa barque, petit bateau, petit bateau au bord des piles, au bord du temps.

Les grands vaisseaux sont curieux, il ose penser les femmes pleurent, ils n’ont rien franchi, le commandant est roux sur sa petite, petite barque, il tangue et il retourne ils sont tous chefs, ils sont tous grands, ils ont posé sur l’eau la plus grande planche, la planche bien droite, sans courbure, au détail près, à la ligne si claire le conquérant assuré sur l’eau.

Dans sa petite, petite barque, il est monté en courant, il est descendu en courant, il a pris le beau temps, il a tenu sur l’eau et arrêté la flotte, il est brave et serein et joyeux, joyeux, dans l’effort, il chante pour eux seuls, dans son cœur ému, il les couronne et chante leurs louanges, petit bateau, tenu si grand et grande planche posée comme d’un doigt.

Et rendue à l’enfance, sur le plat bien plus haut, bien plus haut, il est remonté, il a vu, les hommes sont venus, ils sont là, ils attendent, il entend dans son cœur le chant joyeux des hommes qui réussissent, il entend l’effusion, ils ont construit un pont pour mener loin encore, pour sortir vers le sud, pour enterrer la civilisation pour tordre et partager la sauvagerie.

Le sanglot étouffé, il voit au ciel un grand compas qui trace sur les airs les plans pour l’avenir, sa vie est suspendue, les fils sont tendus, ils sont si vieux et si peu, si peu, sur le chemin, dans la poussière, dans l’oubli ils ont évoqué, ce qui ne s’oublie pas, la guerre, les fracas, les ombres familières, les absent avaient tort, la lune ce soir y posera son charme.

Et la civilisation cessera à nouveau aux lèvres de ce pont, il est un trait d’union de sauvage à sauvage, de déraison à déraison, il effrayera toujours les enfants, les chiens et les chevaux. Il va se fatiguer, il sera épuisé au sortir de l’été, au sortir du temps, le chaud si chaud embarrasse et contracte, il est presque devenu sauvage, il se retourne.

Il est pétri d’effroi, il avance tout seul et sort sur le chemin, épuisé et peu sûr. Un seul tout petit était là, il a pris l’héritage, les plus anciens ont oublié, ils sont partis sur l’eau, ils vont attendre ce soir la lune.

07 Août 2009.

1 commentaire:



  1. Le pont est sur le toit
    la raison sous le bras

    il devance l'appel
    et s'accroche au rivage

    le pont est déconstruit
    on va le reconstruire

    il siffle avec son cœur
    et rappelle le chien ...



    D'un pont ... à l'autre
    il est pétri d’effroi



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