mardi 1 mai 2018

Le présent ...

Le présent est amer et le jour obscur. C’est le froid qui le fait chanter à cette heure. Il doit condamner l’habitude et fendre à la fenêtre une volée de bois vert. Sa violence est écrite dans son geste, ses genoux sont de pailles et fléchissent à tout propos, ses mots se jettent et brillent sur le sol, il a fait tomber son bâton et rempli son sac de malices et d’épreuves. La confiance est sa force, le genou est fléchi et rien n’avance, ni preuve ni succès. Orphelin en attente, il chante dans le bleu, le ciel est levé haut sur les nuages : ils avancent et gardent en jalousie la pluie et la neige, les rafales glacent l’eau et le givre secoue les hommes. Il a si froid au matin, son jour est couvert et l’écho tonne comme un loup privé de dépouilles, il faut manger et boire et se coucher, dormir, rêver et être.

Les histoires s’accumulent dans la tête de cet amoureux, il se donne une escapade, une aubade glacée et noire. La gelée blanche sur le bleu, la nuit au matin tremble, suffit au retour des batailles, les coups perdus dans l’air froid marquent sa peau. Il jauge des semis de petits cailloux dans sa main et vise loin une avancée de chagrin. Vers l’autre, il finit son pain. Il fait froid, la mer monte au loin et si longtemps, l’effort enchâsse sa volonté. La peur du vide est à l’écluse, à l’aune de ses pensées. Il se frotte dans les draps blancs et finit une bataille de rêves bleus et noirs de jus de vendange. Il redoute le temps qui passe et change de pied chaque soir, un peu à gauche, un peu à droite et fait semblant de saisir l’occasion pour débroussailler le chemin rude de la vie, elle passe en escarmouches et en oublis. La peur livre aux accidents du chemin, un pied qui boite et une entaille, un coup du sort pour le chagrin. La vengeance et le remord en un festin désignent la grâce. La lumière éclabousse la saison, le froid durcit l’eau de sa bouche et confine l’air sous la toile. Il se frotte dans l’escalier et en échange de menaces offre au monde une allure de liberté, une cascade de bienfaisance.

Les étrangers qui croisent autour finissent la route, l’eau a gelé et glisse pour ces anges en visite. L’indécision est un appel d’éternité, le doute remplit la besace, le sac revient d’amour chargé. Il est fiancé à la fortune, pauvre d’élans et riche d’absence, la volonté change la face en or du soir. Les ombres compliquent l’espoir et composent un recueil de grande sagesse, construit en miroir, les contraires le grandissent, il faut voir et entendre tout ce qui fut oublié et reconnu dans le livre de ses pensées. La confusion menace, le froid a brisé tous les mots, sur la route la glace prend sur un bâton de marche. Il reviendra plus léger et fidèle attaché à l’autre par un lien de glace et de givre qui se cassera au matin.

Son visage se couvre de rides et l’ardeur s’endort, le feu couve sous le givre, l’amour avance sans bruit.

21 Décembre 2005.

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