vendredi 8 février 2019

Onan, Ossian.



On y revient toujours, on se remplit encore, on recommence et on reprend toujours la même portée, du sucre par-dessus, du sel sur tout cela, pour enfoncer le fer, pour porter la décision plus haut, plus loin, il est grand, il est loin, il est fort, il est plus mystérieux encore, que le temps, que le temps de la voix sucrée au bout des lèvres, il chante sur le bord du toit et du temps, il chante sans rien faire, un tout petit peu d’air sur le bord de la vie, il explose tout seul, il regarde toujours un tout petit peu d’air, sur le bord, sur l’appui, il se tourne et dépense en une seule fois le panier plein, si plein de charme et de volupté.

Il enfonce sur tout le plein, le délié, il se ferme, il attire sur lui, et la foudre, et le vent sec chargé d’iode et de supplice, il tourne sur lui-même et refuse l’épreuve, il se noie, il s’échappe, il refuse le sacrifice, il ne donne rien, il retient tout pour ses offrandes, dans son panier, sur ses mains, sur son front, il porte un panier et le remplit d’échos et de fortune, l’orage est sec, ses orages sont longs et il éteint toujours la flamme sur la table, il éteint, il réclame et le sel et le vin et le pain confondu sur le dos, sur la rampe, sur le parcours informe, sur le devant de tout, sur le retour des anciens au supplice, il tire une corde et il va.

Il reprend le chemin, au bout du bout, au loin du loin, il tire sur une corde et fend de l’air l’absence, le repos est vaincu, la vie est offensée, il se noie, il se perd, il est marqué par l’habitude, il pose un panier vide sur son front et marche, marche droit devant, droit devant il ensanglante l’air, l’osier a coupé son arcade, il se tourne et perd du sang au sol, du sang au sol, il souffre et il répand à terre sa substance, Onan, Onan, es-tu enfin libéré, Ossian, Ossian es-tu évanoui, es-tu éclairé sur la rive, tu désirais le froid et tu te perd sur le rivage, entre le grand livre de tous et le petit chapitre, pauvre petite histoire.

Susurrée, murmurée, l’histoire perdue sur le chemin, il en arrose le sol et il retient son souffle, le pas est inégal, la colère est sourde, mais il se penche et songe, deux frères sont perdus, Onan, Ossian, il avance vers l’eau, il détourne les yeux, le liquide est perdu, la main aussi ruisselle, il est fendu et mordu, de toute part, il est affronté à l’histoire, le temps de boire, boire, il recommence et plie sur les genoux, ils se contemplent, de siècles en siècles, ils sont perdus pour tout, le barde et le biblique, ils sont en écho, le grand écho, la bouche bée, ils se repaissent du même poids de roche, manne tombée, perdue.

Du rire des saisons, les enfants écartés, les derniers sons de cloche, ils sont récupérés et joyeux et ils se donnent, tempes blêmes, Ossian et Onan, sortis sur terre sous ses doigts, il est aventureux et il tourne sur lui, l’orage gronde, il se bascule, ils ont chanté la nuit, ils ont trahi le jour, ils se répandent et à terre et sur terre et coule, coule, ce qui coule et des mots et du sang et la profonde liaison, la nouaison perdue, ils répandent au sol une précieuse semence, le lait en est perdu, la raison égarée, ils sont à se donner en tout, sans salaire aucun, rien au retour de ce partage étrange, de cette obscure germination.

Ils sont répandus sur la terre et les vieux sages chantent, il faut y revenir et soulever le sceptre, ces deux rois sont perdus, ces héritiers meurent sans autre descendance, le ciel est outragé, la maison sera vide, le sang coule inutile, ils sont répandus sur le sable, le sol brille encore, ils sont abandonnés et ils se perdent sur le sable au soleil, sur le temps sans rien faire, ils écoutent et menacent, ils se refusent et vident leur sacs sur la terre sèche, il est sec cet orage, il n’ensemence rien, ils sont défigurés et croisés et sans âge ils se donnent. Au blanc, au blanc, à blanc, sans rien comprendre, le temps est suspendu.

La croix sur les épaules, ils chantent, la voix triste, ils restent sourds et ils ne voient plus rien.

10 Août 2009.

2 commentaires:

  1. Onan honora la Terre de sa semence. Alors, la Terre s’éveilla au souffle du printemps, elle se mit à chanter et enivra les anges de sa voix de sucre et de sel.

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  2. un texte magnifique
    d'une grande poésie
    merci au poète

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