jeudi 7 mars 2019

L’un à l’autre.



Abrège, mais recommence, penseur subtil, peintre de la nature, voyant d’immobilité. Tu répands sur le bord des routes ton ombre et ta servilité, tu es perdu et sans attaches, tu erres et tu te tiens droit, tu tournes sur toi-même et tu reprends toujours entre les bras, la foule immense de ceux à qui il faut pardonner.

Un mot après l’autre, une chance en voici, en veux tu, il est trop haut placé, il est trop dans l’espace ton beau sourire. Ta suave fertilité te reprend, tu joues, tu cries, tu es indéfini et un rien, dans le cœur reprend tout et tu comptes. Tu es venu, tu es rentré, tu marches et tu finis un mot après un autre.

Ton ombre au bord des routes, une espérance de fraîcheur, de la glace sur les épaules, du caillou sur la langue, de la boue dans le cœur, tu es fini, tu finis, tu implores, tu y reviens, et tu reprends sur le dos de la main, sur la pointe du cœur, tu reprends la vie à sa blessure, le sang versé au plus jeunes, ils y sont :

« Ils sont enfants d’une même mère, ils sont à perdre et à recommencer, ils sont tendus, ils sont perdus, ils y reviennent, ils sont surpris du décor de l’histoire, des rubans qui flottent au vent, ils se racontent, ils étalent au sol le tapis rouge et bleu des histoires très anciennes, des rêves évanouis, des terreurs sous la lame.

Les comptes rendus, les points percés, ils échangent la vie à son allure : un pas, un autre, un effort et sans arrêt. Ils sont étendus sur la rive, le flanc posé au sable et aux cailloux, ils échancrent les habits, linges blancs et rouges, ils se déchirent, ils immolent le bien tenu, le cri des sourds, les mots.

Les phrases tirées des eaux assemblées, ils se perdent, ils se reprennent, ils échangent de l’affection, des lettres tachées, des griffures aux genoux, des blessures en couronnes, ils sont traqués et ne résistent plus. Ils sont perdus, ils sont étranges, ils se déplacent sans effort et découvrent la peur sous les voiles.

A voir le penseur sourire et comprendre, ils se donnent, ils se détournent, ils recommencent, ils échangent du blé, des pierres, de l’eau et du ciel bleu, des pensées sans pitié, un trou dans l’air, un souffle endormi, ils sont posés sur les marches, le temps y va, le temps avant, la vérité, la sécheresse.

Le trouble extrême, la raison pure, ils se donnent aux mots, aux phrases, ils sont en attente de l’apocalypse, le mal reviendra sur cette terre, dans leurs élans, abrège, ils recommencent, le trouble est contenu, la peur est enfouie, le reste peut attendre, ils dormiront encore, sur les tas de sable et les feuilles : ils se donneront. »

L’un à l’autre, abrège.

19 Juillet 2010.

1 commentaire:

  1. Ils y sont
    L’un à l’autre, un mot dans l’autre, caillou de mots sur la langue d’un cœur chagrin.

    Ils y sont
    Enfants de la Terre et du Ciel, que le vent porte sur un ruban de sable et d’amer, très loin, très loin dans des rêves de poudre et de lames de sel.

    Ils y sont
    Enfants marins, l’un pour l’autre et l’un sans l’autre, enfants rois et écorce de mère. Chérubins à la peau de nacre et pépites d’albâtre.

    "Ils échancrent les habits, linges blancs et rouges, ils se déchirent, ils immolent le bien tenu"... comme cela chante beau, comme cela fait palpiter le cœur... le cœur cogne, s'emballe, cavale et vient reprendre son souffle sur le bord des lèvres.
    Il est des phrases comme celle-ci, qui perturbent et épinglent le cœur.

    RépondreSupprimer