vendredi 19 octobre 2018

Ils remplissent, ils vident, in « Le poids ».



Il y a sur la route, sur le sel, sur le large, une longue et lente, une longue et lente explosion. Un espace, un retour, un rien, un monde, une urgence, la vie est nouvelle, il faut accumuler et donner, des cailloux, du retard, de la douleur, de la fermeté, et en faire et en dire, sur le devant, des dangers, de la soif et de l'espérance, du vide, des rencontres, des forfaits et des trahisons.

Là, est posé sur le sol, le corps nu dans la paille, les écorchures, le remord. Ils ont accumulé, ils ont étendu et déposé sur le sol, sur la paille, des objets, du marbre, des collections, de la fourrure et des visages, des anges en peinture, des corps abandonnés et permis au passage et offerts au vent du large. Ils avancent bien seuls et composent l'ouvrage et finissent sur le flanc, le corps nu sur la paille, offert, les courbes neuves au vent qui passe et caresse, et fond sur le sol et couvre les objets, le marbre et leur attente.

Ils se reposent aussi et frottent la paume sur les objets perdus, sur le tableau du monde, sur le pavé si noir et couvert de paille, ils se frottent et attendent et espèrent, des roses, de la gloire, du sentiment, de la splendeur et des phrases de joie pour offrir de l'amour, des branches fleuries, du parfum, sur l'écorce et le givre.

La splendeur, le refus, le repos, l'orgueil, et le reflet doré, et le sens de la vie, les erreurs, le goût et le partage et la domination, sur le sentier, ils attendent l'histoire et ferment les yeux sur les retrouvailles. Ils lèvent et enchantent et connaissent le poids des peaux de bêtes sur leurs épaules nues, sur le chemin tordu couvert de givre et d'évidences.

Ils se torturent et tournent dans la tête les mots jaloux, le poids des idées et des rites. La fraîcheur et le temps, ils pèsent d'un poids noir, d'une erreur de corail et de solitude. Il y a sur le sol, la paille et le marbre, et le souvenir lourd et le regret noirci, les fleurs fanées, les ébauches, les rires, les saisons ravagées, les heures sans sommeil, le poids bien lourd et bien noir des avancées vers l'ombre, vers la peur, vers la nuit, vers le courant perdu.

Les mots sont aveugles et sourds, les saisons sont perdues en espérance, la confiance est mortelle, les regrets sont incertains. Il pèse, lourd et bleu et bien pendu sur l'eau, le poids, des sacs de rien, des outres de vent raide. Des filets de sable coulent entre les doigts, sous les yeux, perdus dans le cœur et dans l'ombre.

Il fait froid, il fait du vent, ils cheminent dans l'ombre et comptent les mots sur les doigts, sur le cœur, le bien épanoui et gonflé de terreurs. Ils avancent vers l'ombre et pleurent en chemin, ô que tout est noir, ô que tout cela est lourd et sans rien et sans joie et fermé sur les dents.

Les lèvres pincées écourtent le temps, ils pleurent en silence, sur le dos de la main, sur le pied qui souffre et marque le monde de sa déraison, ils sont pendus, ils sont tristes, ils sont aveugles et fermés sur l'oubli, et perdus dans le monde et chargés du rien qui pèse un poids de planches et de cailloux. Ils remplissent, ils vident, une outre de vent, ils gonflent et se suspendent et attendent des vertiges, des erreurs, des remords, du poids de l'eau dans l'air, du rire sur le sable.

31 Décembre 2007.

1 commentaire:

  1. Superbes mots sont les vôtres.
    Lorsque le ciel s'ouvre et s'appelle ténèbres, un oeil de couleur apparaît et se glisse tout au fond de l'espace... alors le temps s'immobilise dans l'épaisseur du monde et le fleuve de l'extase.

    RépondreSupprimer