jeudi 11 octobre 2018

La ruine est violente, un carnage

Nous sommes dans le fracas, nous sommes dans les tourments, les catastrophes sont là, posées sur le divan, posées sur la fontaine. Ils avancent, ils regardent, ils affolent, ils noient et arrachent les os d’un coup d’œil, d’un coup de dent, d’un coup de rein. Sur la couverture, ils sont échancrés et tordus et partis et rentrés, rien sur le visage, rien sur le corps, ils claquent des dents et recommencent, ils se tordent sur la lumière et griffent, et griffent la peau d’un revers d’ongle, d’un retour.

Les mains frappent l’air, les toiles sèchent dans un souffle, dans un accord. Posés sur le tas de pierres et de gravas, ils se tournent et recommencent et griffent le sol, le sol, les animaux perdus, les enfants perdus, les désespérés retrouvés, grandis dans la lumière, ils se tendent et recommencent et arrachent de la peau sur le temps, de l’ouragan sur la terreur, du bien perdu, du bien fondé, de la douleur entre grise et noire et de la colère à poings perdus, à poings serrés, sur le cou, sur le col. Les boutons volent sur l’air bleu.

La colère, la cruauté, le retour du tonnerre, la confusion, l’ordre et la tempête, ils se tirent et tirent sur la peau, sur le cœur, dans la ferveur, dans le retard, dans le silence imposé à la vérité, oubliée et retenue et partagée. Ils s’envolent et dégrafent le col, le pied, le dos, la main tenue et retendue, le vent s’engouffre dans la serrure et ils se tiennent et ils arrachent, le combat est furieux, la peur vole sur le temps, l’espoir arrache un cri sauvage à la main perdue.

Elle sème et recommence, le grain vole dans le vent, poussière et fleurs perdues, mêlées, tendues et composées et revenues et reperdues. Sans effort, ils se balancent, au bruit, au vent, les peurs, les outrages, les outrages et le combat, et le silence entre les coups, entre les mains tendues, fragiles, sans respect, et sans partage et le silence et la confusion dans l’échange, et le vent souffle sur la catastrophe et il se penche sur l’oubli.

Ils tiennent les mains au repos, ils ne voient plus ni corps ni âme, ils sont dans le fracas, dans la catastrophe, dans l’épouvante, le vent souffle, l’air est froid, ils se retiennent et recommencent, les corps tournent en long, en large, sans façon, sans raison, sans rien à dire. Le froid, le vent, la peur, le temps perdu, les hirondelles sur les arbres, le vol, les feuilles déjà dans la tourmente, ils sont entrés dans le fracas et pleurent loin, les coups au cœur, les coups dans la tête, sur le devant, au visage.

L’horreur les tient, ils sont entrés dans l’épouvante. Ils se sont perdus en route, ils sont surpris, le temps est passé, le temps est venu, le froid est sur les hanches, les oiseaux volent au ciel bleu et perdu des yeux des noyés, des sans âmes. Ne rien en faire, ne rien dire et poser sur la couverture un fardeau de déraison, un étranglement des habitudes, l’amer et le violent et les soucis, il faut taire, taire et laisser mourir d’un coup d’aile, la violence accroche au temps, un lambeau de peau, un soupçon de carnage.

20 Août 2007

5 commentaires:


  1. à michel chalandon

    il tire sur la peau du langage. il crève sur la peau de la raison. il affronte l'oubli la non-reconnaissance. il avance cependant il n'en a cure. avec sa boussole qui fait perdre le nord. le trou noir dans les ailes des engoulevents. l'encrier dans le trou du pupitre qui sentait verte campagne et toutes les guerres infâmes. adieu la vie adieu l'amour adieu les enfants du limon. et l'enfance de l'art.

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  2. var il crève le tambour de la raison.

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  5. Comme un étourdissement.

    Après le déferlement de cette nuit de carnage, à force de tourment, à force de résignation, à renoncer par peur, discernement et frayeur, les amarres brisées par tant d'accablement, il ne reste plus qu’un gémissement, un soubresaut au cœur de l’humain prêt à amnistier.

    Les mains cherchent les accords dans une partition de gravas. Elles griffent les notes de leurs doigts de lumière. Elles arrachent la terreur, la douleur, la fureur. Sous la lampe glisse la voix d'un ange, et une lueur d’espoir.

    La cruauté s’engouffre dans le col et frappe le pied, lacère le dos, arrache la peau et broie le cœur. La main tendue dans le silence essuie les cris de désespoir. La main tendue dans le silence supplie, demande et se lamente "Fais-nous revenir vers toi (…) Apporte-nous des jours nouveaux comme autrefois…"*

    Les ténèbres partout en eux et hors d’eux, et la lumière par-delà les ténèbres. De leurs mains tendues et leurs doigts de fil, ils tissent la nuit et happent les étoiles, pour les offrir et sauver du carnage.

    Dans l’ombre les yeux devinent les craquements de l’intérieur. Tout est secoué et convulsif. Ils s’agrippent aux lambeaux de la vie pour regarder dehors, et tout est pire que jamais. Tout est déchaîné, anéanti. Le vent hurle et leurs cris, leurs pleurs surpassent le vent, déchirent les cœurs et disloquent les visages. Tout est lacéré, exterminé et perdu.

    Les yeux et les âmes plus pâles que jamais… les corps et les cœurs en long, en large transpercés… les bouches crient l’épouvante de tant de carnage jeté à la figure… les mains se tendent vers le ciel… les mains se hissent et supplient… où sont les étoiles … ? …


    Votre texte est terrible, terrible, terriblement beau, il nous faut une respiration, donnez-nous une consolation…


    * (Lamentations 5:21).

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