vendredi 6 avril 2018

Roman. II

Saint Sébastien. 

Grave et concentré il avance et regarde la mer. Il attend la vague et se donne pour attendre une allure de vie. La chaleur enchante les muscles qui roulent sous la peau et frappent sur le cœur avec une constance d'horloge. Les effets du voyage encerclent la raison et font frémir la barbe à peine éclose. Le vent frappe le dos et glisse sous les cils, les yeux sont piqués au rouge de la vie, regard coloré par les rires et les chansons qui coulent, les hommes campent sur le bord, front de regards noirs et bleus qui n'effarouchent personne, la vague est loin, le petit est sanglé dans un tissu rouge qui laisse voir le poil et les seins agrafés à la poitrine. Il avance sur la plage et attend la vague, comme de plus anciens, il frappe l'eau et attend, les monstres vont surgir du fond et renverser peut être ces enfants qui dansent sur des planches et attendent pour se confronter aux risques du déséquilibre, la vie les remue et ils dansent sous le regard des hommes qui espèrent une royauté sans partage sur la mer et les montagnes. La rigueur de la tenue de cet enfant qui attend est un défi à tous les temps qui passent, à la suite des jours et au retour du rien sur le fil de l'onde qui claque sous la main et se répète sans fin. Les jeunes générations se reconnaissent dans les rites anciens et attirent sur le bord les monstres des profondeurs, pour fuir sur le dos du courant qui tangue et forcer le destin à tenir longtemps et revenir d’où on est parti, les eaux écument sur le ventre, le bateau de ligne se détache de son appontement, le tissu rouge serre fort sur le torse et jette en avant une forêt de poils et les deux seins qui tentent le regard. La vie se répète et fascine les anges qui se désolent, le regard est noir, le poil boucle les reins serrés dans le tissu rouge qui force les rondeurs et dispose le dos à la souplesse de la vague.

Cette caresse de vent et de bateaux, une fuite, un reflet de visage sur le verre, une confidence de cailloux sur le sable rosé, le quart de lune passe à l'horizon sur la ligne qui joint les drapeaux aux forêts, la bannière flotte et les anciens chantent, ils sont armés pour que les jeunes s'amusent sans souci et vivent d'insouciance et de repos.

Grave et concentré il avance et regarde la mer, sa ferveur efface la futilité.

16 Août 2005.

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