mardi 27 novembre 2018

Où.


I

Où vont ils, où vont-ils, ils sont là, ils ne sont pas loin, ils ne sont pas bien, il y aura au ciel un retour juste des choses.

Il pousse la porte, il voit des signes, il sent le vent et s’enfonce dans la lumière, il y a des éclairs et du souffle, de la grandeur, du renoncement, des fleurs sèches, le câble est blanc. Il y aura au matin, sans trembler, la violence et le son sans attendre. La lumière, la chaleur gouvernent ce grand vide, il y a dans l’attente un goût de larmes, un goût, de sang, de peu, de rien, il tord la bouche, lacère le cœur et déchire les membres.

Le rêve et les sarcasmes déposent le temps, déchirent la figure, verrouillent et recomposent et le mur et le toit et les arbres qui dansent. Au soleil et à l’ombre il a relevé la figure, il charge son fardeau, il porte son poids de murs et d’épaules, il avance, il ne peut vaincre, il ne peut que trembler, il avance, il perd et il tremble.

Il a repéré un rien, un terme, un sanglot, il voit sur la route la poussière et le feu et ce grand drame, ce masque tragique, il le couvre, il le porte à ses tempes, il serre la ficelle, il consulte le feu. Un pied après l’autre pose le poids du corps sur le sol, sur la terre sèche, chaque pas est une seconde, chaque pas est un temps, il avance, il martèle, il pose pourtant le pied presque légèrement sur la terre sèche.

Il a franchi la porte et voit sous le soleil les carreaux arrachés, les pierres démontées, une à une les pierres, une à une les gouttes, une après l’autre les fleurs, et le sable, le soleil pleut, il tombe fort.

La voix s’éteint, la voix se meurt, bientôt muette, bientôt perdue et vient du sud et vient d’ailleurs et se taira bientôt pour longtemps. Il marche en escaliers et décroise la pente, et au soleil cherche son ombre, se cache sous les pierres et murmure tout bas : j’avance et je meurs et je défie le temps et je défie la nuit et je cherche l’espérance. Il avance en poudre fine, recompose le temps, se défend la nuit, sort du bois, espère, attend les bêtes, défend les cailloux, polit la soif, défigure le temps, reconnaît les pas, change et avance et compte les cailloux et ramasse le bois et figure l’espace. Il chantait dans le temps, il chantait dans la peur, il sifflait, il voyait, il figurait l’espace, il découpait la joie, il sonnait le destin et se cachait, oiseaux sous les arbres.
II

On vient, on avance, on plie, on défigure, on racle le sol, on cherche les fruits tombés sur la terre entre les cailloux. On, il, je, croient et croisent, et raclent le chemin et couvrent la coquille et dispersent et rassemblent les os épars.

L’espérance est digne, le charnier est inutile, un trou plus un trou, il avance dans le vide, il avance dans la peur et se tord et se gonfle et se méprise.

Il y aura au ciel un retour juste des choses, le champ est dévasté, la colère est intacte, le raisin a tourné, les blés sont ramassés, pour l’espérance la résine pleure, le sentier dévasté ruisselle de malheur.

Les hirondelles vont, les fous les recommandent, il se passe sur ce coin une aventure étrange, la chaleur les accable et le je, et le on, et le il, se perdent, et recommencent. La terre est effondrée, le sens est amer, au loin il y a l’eau, il y a le vert, des regards effarouchés, de l’amertume au coin des lèvres.

La feuille se dépose, le vent est familier, les herbes, le soleil, les gens et les rangs asséchés et là, bien par là, un paysage nouveau : une visite étrange au cœur du temps, un retour des oiseaux, une infinie douceur, une grande quiétude, il est passé par monts, il est passé par vaux, le cœur enrubanné, les yeux infertiles et il avance et découvre la mer, et découvre le temps, l’océan, les sanglots, les restes, la jointure.

Ils n’ont rien fait, ils n’ont rien pris, ils n’ont rien compris, ils n’ont rien assumé, ils n’ont rien tenu, ils n’ont rien saisi, ils n’ont plus rien à faire, ils découvrent, ils se cachent et rompent et oublient un voyage pour rien, un voyage perdu, sous la terre et dans l’eau.

Ce qui est important c’est la lumière au travers de la porte, c’est le vent sous les bras, c’est le vent dans les branches, et la construction calme et une pierre sur une autre et le toit qui s’élève et la maison qui s’ouvre, pour recevoir en face le ciel bleu et le jour.

Il faut être armé de chaleur et d’amour.

28 Juillet 2008.

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