dimanche 20 janvier 2019

Ils déposent, ils écartent.

Il leur faut terminer ce chantier, reprendre la surface, dégager un angle après l’autre et déposer au ciel en offrande, un tas de raison pure, une idée défendue par un reste de soif pour entrouvrir l’azur et dire sans attendre : la saison avance, les fruits sont murs, il faut, il faut engranger, déposer, entreposer, répandre, commencer et espérer, surtout espérer.

Le palais, la corniche, les grandes voluptés, les fils tendus sur l’eau, ils attrapent le temps, ils débroussaillent l’aube, et ils étirent le drap bien trop plié, ils sont cernés de rides, fatigués d’abandon, ils commencent, ils connaissent, ils défigurent la peau et les ridules sur la tempe, ils sont encore à éveiller. Le chantier attendra, les fleurs, ils s’éloigneront de tout.

Ce train, les fables, les lois, les dictons, les bravades, ils disent ensemble des blagues, des bêtises, ils déposent au lit des draps, des couvertures, ils écartent les rideaux, la confiance émue à la poitrine, à l’aube ils se répandent encore et ils prennent le temps, de chanter, d’enfanter, de faire des images, de compter les feuilles une à une tournées au soleil.

Le temps, le ciel bleu, les oiseaux envolés, ils se reprennent et donnent un coup de pied au linge, ils sont éparpillés, ils sont amoncelés, défaits et étrangement lisses, ils sont à recompter les vagues de souvenirs chers. Ils attrapent le temps, ils débroussaillent l’aube, ils répandent le linge accumulé, les fils un à un tirent, ils sont grands au ciel bleu.

Ils avancent ces deux inconnus jamais vus, ni touchés, ni sentis dans le cou, au cœur meurtri, au cœur grandi, ils se répandent et redisent nous étions si bien, si deux entremêlés et purs. Le chantier est ouvert, les constructions sont posées sur le sable, les trous bouchés et rebouchés, les greniers comblés, la vie est répandue, ils chantent sous les arbres.

Ces ouvriers d’eux même, ces répandus au sol, retournés au flanc nu, à la gerbe qui bat, au mur perdu, au mur à flétrir d’un enduit immortel, d’une couronne ardente, d’une éruption sereine et si présente à l’ardeur de midi le juste, de minuit plein, des errances permises, ils se défont et poussent une à une les pierres pour monter des murs d’espérance.

Il est comblé, il chante, le grenier si plein de grain, ils ont bâti une réserve, ils entassent des trésors de sagesse et de charité, ils avancent et poussent des pierres, des serments, des évidences folles. Ils sont convaincus et sans crainte, ils sont paisibles et présents au monde, aux hommes, au partage, dans le calme, si calme, dans l’étreinte, si longue.

Ils poussent encore le si long sanglot, la si longue plainte, le calme en évidence, les enfants déposés au bord du chemin, si près de la prochaine route. Ils sont pris aux épaules, ils sont blessés au bras. Ils se dérangent, ils se corrigent, ils avancent toujours vers le trésor perdu, caché dans la langue tournée sept fois, répandue au sol dans l’eau versée.

Ils se cachent, ils effleurent, ils grandissent toujours incertains et ravis, ils sont tendus et gardent sur la tête le linge accumulé, la poussière effacée. Le chantier attendra, les fleurs sont en partance, ils s’éloigneront de tout ce train, les fables et les lois, les dictons, les bravades, ils disent tout ensemble des bêtises, ils déposent au lit des draps, ils écartent les rideaux.

20 Juillet 2009.

1 commentaire:

  1. De la bouche du ciel coule une sève de coriandre et d’orange. Une porte s’est ouverte, le tabernacle maternel offre son sein gorgé de lait et de miel, de fruits juteux à la peau fine et câline. La vie, l’amour, la mort se faufilent par les interstices du temps, la saison avance.

    Les vagues remontent les souvenirs d’antan. Les oiseaux sont contents et distendent le temps. De grands "draps d’aube fine" glissent sur le rebord du monde, dans l’espoir que le ciel leur envoie un grand souffle.

    Ils chantent sous le ciel la lumière et les cendres du matin qui avance. Les lignes de la vie foisonnent sur le sable et griffent le cœur des arbres en un frémissement continu, une agitation des vagues, et de pleurs anthracite.

    Le chagrin est immense sur la route de l’exode. Les enfants en souffrance, perdus au-delà des rivages, en arrière de la source, en avant des cataclysmes. Ils avancent vers l’inconnu sur cette route de désertion et de déluge, avec dans le cœur l’espoir inassouvi d’une douce lumière.



    merci et beau jour.

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